• Description

Le gouvernement, à Tours, craint d’être capturé par l’ennemi. Il déménage à Bordeaux.

Dans le Loiret, les combats continuent. L’armée de la Loire tente de bloquer l’ennemi au niveau de Beaugency.

A Villorceau, le 75e régiment de gardes mobiles du Loir-et-Cher et du Maine-et-Loire, le réveil est difficile. Le jour qui se lève est gris, le sol dur et glissant. Les fermes et les hameaux sont vides de leurs habitants, qui ont fui dans la forêt de Marchenoir ou vers Blois. Le peu qui reste s’est réfugié dans les caves. Quelques braves résistent. Ils ne bougeront pas et viendront en aide aux soldats blessés.

Le 75e mobile est à bout de forces. Vêtus de haillons, peu nourris, presque pieds nus, début sous une neige froide et pénétrante, ils attendent les ordres. Une fois encore, ils vont assister au combat, de loin, du moins les 1er et 2èmes bataillons. Ils se rendent entre le Mée et Vernon, pour garder l’artillerie qui tonne avec rage.

Alors qu’ils se sont réfugiés derrière un énorme tas de fumier, les tambours et clairons du 2e bataillon sont atteints par un obus à fusée percutante, qui a éclaté en touchant le sol. Le caporal Guibert, de Sainte-Gemmes, a les deux jambes brisées. Elles ne tiennent plus que par quelques tendons qu’il demande à deux camarades l’emportant à l’ambulance, de couper. Il décèdera le surlendemain. J. Briais, d’Orchaise, père d’un jeune enfant, est grièvement blessé à la cuisse. Il tombera entre les mains de l’ennemi et sera compté comme disparu. Labbé, de Vineuil, un des tambours, a la jambe coupée. Les autres sont morts. Deux sergents, dont Jules Desroches, sont blessés, sans que le bataillon ait tiré un seul coup de feu.

Le 3e bataillon, sous les ordres du commandant de la Vingtrie, est positionné entre le Mée et Villorceau, dans un enfoncement de terrain d’une dizaine de mètres de profondeur. L’artillerie qu’il protège est en arrière, sur la crète. Les projectiles de l’armée ennemie passent par-dessus les mobiles. Les canons français doivent reculer et les obus prussiens s’approchent dangereusement des mobiles. Le commandant de la Vingtrie forme son bataillon en colonne, qu’il dirige, au gré des tirs ennemis, d’un côté et de l’autre du ravin, parfois jusqu’aux premières maisons de Villorceau, toujours hors d’atteinte des projectiles. Ce jeu du chat et de la souris dure plusieurs heures, jusqu’à ce que le commandant reçoive l’ordre de marche en avant. Il déploie ses hommes, leur fait gravir le versant droit de la colline et franchir le sommet où le combat est vif.

Villorceau

Devant le bataillon, le village du Mée, occupé par les prussiens et attaqué par le 33e mobile. Les mobiles du 75e arrivent sans tirer jusqu’aux mobiles du 33e auxquels ils se mêlent. C’est un peu la confusion. Un des bataillons de la Sarthe a atteint les premières maisons du village et agite le drapeau, mais le 39e de marche ne voit pas le signal et continue à tirer. Les prussiens embusqués dans les maisons tirent aussi. Un appel du clairon met fin à de possibles tirs amis et les hommes du 39e rejoignent les mobiles. Il est trois heures et demie. Les munitions commencent à manquer, alors, ce sera à la baïonnette. Un furieux combat s’engage, maison par maison jusqu’à ce que le village entier soit redevenu français. Une centaine de prussiens sont faits prisonniers. Le 3e bataillon de mobiles du Loir-et-Cher a quatre tués et vingt-trois blessés. Mais la position conquise n’est pas gardée et les hommes retournent cantonner à Villorceau.

Le 8 décembre 1870, à Lorges, toutes les troupes du 49e régiment des mobiles de l’Orne sont sous les armes. Des épaulements viennent d’être construits pour l’artillerie. A huit heures et demie du matin, de fortes reconnaissances prussiennes descendent de Tour, Villeneuve et la Villette sur Villermain, dans le Loir-et-Cher, et sur la ferme de la Motte. Le combat commence à neuf heures, sur Poisly.

Vers midi, l’ennemi établit ses batteries à La Villette et fait descendre son infanterie sur la ferme de la Motte et sur la route de Prenay, pour forcer les lignes de la 2e brigade, la 1ère ayant résisté au combat du matin, les empêchant de passer.

Les 1er et 2e bataillons de mobiles de l’Orne sont placés en tirailleurs et résistent, comme le 41e de ligne, placé à leur droite. A midi, deux compagnies du 4e bataillon de l’Orne s’emparent de deux maisons situées sur la route, pour empêcher les allemands d’y prendre position, permettant au 1er bataillon d’Eure-et-Loir, de passer sur leur gauche et de dégager une partie du bataillon trop près de l’ennemi. La ferme de la Martinière, occupée par les prussiens, est enlevée à la baïonnette, par deux compagnies du 1er bataillon des mobiles de l’Orne. Trois mobiles sont tués et dix blessés, mais la position est importante. Pendant ce temps, la batterie de marine du capitaine Fournier appuyant la 2e brigade, tire si juste et avec régularité que les prussiens doivent se retirer sans avoir pu prendre la ferme de la Motte. Les trois bataillons de l’Orne occupent le plateau et conservent la position, malgré une charge de cavalerie prussienne.

Lorges

Vers quatre heures, une violente canonnade précède une nouvelle tentative allemande. Les mobiles de l’Orne sont soutenus par deux bataillons des mobiles de la Sarthe, qui, malgré un feu écrasant, avancent en ordre et repoussent l’ennemi, cette fois définitivement. A partir de là, les feux de mousqueterie sont remplacés par un violent combat d’artillerie jusqu’à six heures du soir. Le combat terminé, les mobiles regagnent leur bivouac de la veille. La 2e brigade a eu 40 soldats tués et 115 blessés. Le soir même, un renfort arrive. Les francs-tireurs d’Argentan et cinq compagnies de francs-tireurs de Paris les rejoignent.

A Janville, la vie continue à s’écouler pour les blessés de la bataille de Loigny. Les jours se mêlent et jusqu’à Noël, il n’y a plus de date alors, je vais juste fractionner le récit, jusqu’au 24. Le sergent Deschênes, tous les jours, vient voir le capitaine de Maricourt et ses compagnons, appuyé sur son piquet de tente. Il vient passer la journée avec eux, car il est tout seul dans son logement. Et puis il cesse de venir. Sa blessure au genou s’est envenimée et il doit garder le lit. Cela ne surprend personne. Les blessures non soignées deviennent de plus en plus douloureuses. Les hommes souffrent cruellement, la fièvre est là. Cela fait sept jours qu’ils ont été blessés et ils n’ont toujours pas vu de chirurgien. La plupart ont encore dans le corps, les balles qui les ont blessés.

A Montmedy, dans la nuit du 7 au 8, quelques cavaliers prussiens réussissent à approcher et tirer sur les sentinelles placées près du cimetière. La neige a étouffé leurs pas et les arbres ont caché leur approche. Pour éviter que cela se reproduise, les arbres sont abattus sur plusieurs centaines de mètres de longueur.

A Belfort, la place forte est toujours bombardée. A huit heures du matin, un obus tombe à chaque seconde. Une maison particulière en reçoit huit à la file. A onze heures, le bombardement est si violent qu’il est impossible de sortir. De nombreuses personnes sont tuées ou grièvement blessées en vaquant à des occupations indispensables. Le feu diminue vers onze heure et demie, pour redoubler une heure plus tard. Vers deux heures, l’enfer est partout. Les tirs prussiens se calment enfin, vers cinq heures. Mais les canons de Belfort ne sont pas restés silencieux. Leur feu a été soutenu toute la journée.

Christine Lescène - Le Blog d'une Généalogiste - 8 décembre 2020