• Description

A Paris, tous les jours, il y a des échanges de coups de feu avec les avant-postes.

Armée de la Loire, à Epieds, au lendemain des combats de Coulmiers, un spectacle éprouvant accueille les mobiles de la Sarthe au réveil. Si le village n’a pas souffert du combat, ses rues sont encombrées de voitures, de toutes sortes : omnibus, tapissières, fiacres, calèches bourgeoises, toutes arborant le drapeau de la croix rouge. Elles viennent d’Orléans, pour chercher les blessés transportables. La grande majorité n’a reçu que des pansements sommaires et il est urgent de les envoyer aux ambulances de la ville. Une dizaine de cadavres, pantalon rouge des soldats de ligne, pantalon bleu des gardes mobiles, sont étendus sur une prolonge d’artillerie. Une fosse est ouverte pour eux, aux cimetières. Le long des murs de la nef de l’église, des sacs de soldats, des fusils, chassepots ou remington, certains tordus, brisés, des sabres d’artilleur, des ceinturons, beaucoup de ceinturons, gisent sur le sol. Ce sont les effets des blessés qui sont entassés là, à mesure que les hommes arrivent dans l’église. Celle-ci a été transformée en ambulance. Des matelas et de la paille sont mis de chaque côté de l’allée centrale, dans les bancs. Chacun renferme un ou plusieurs blessés, de tous uniformes. Des flaques de sang recouvrent le pavé. Dans le chœur, plusieurs morts gisent là, le visage recouvert. Ce sont les morts de la nuit, morts à l’ambulance, malgré les soins.

Pour les vivants, c’est l’heure du repas et du repos. Ils reprendront la route le lendemain.

A Orléans, les volontaires de Cathelineau sont arrivés. Les troupes françaises réoccupent la ville.

A Belfort, une partie de la garnison fait une sortie sur Essert. Les caves de l’hôtel de ville sont préparées pour recevoir les habitants que leurs maisons ne peuvent protéger.

A Neuf-Brisach, les ordres donnés aux artilleurs sont effectués. Dès six heures du matin, les pièces rayées sont mises hors de service, demi-lune par demi-lune. Une fois le travail fait et tout le matériel détruit, les hommes se retirent. A six heures et demie, la même opération a lieu dans les contre-gardes. A sept heures quarante-cinq, les pièces de 24 du corps de place sont mises hors service. Pendant la nuit, toutes les munitions ont été épuisées, dans un dernier baroud d’honneur. A la porte de Colmar, les fusées des obus sont détruites. La place est ainsi privée de tous ses moyens de défense, alors même qu’elle est soumise à un feu terrible de l’artillerie prussienne.

A une heure et demie, le drapeau blanc flotte au sommet de l’église. Tous les hommes, artillerie et infanterie, sont à leur poste.

Après trente-trois jours de siège et neuf jours de bombardement sans interruption, la petite place de Neuf-Brisach tombe aux mains de l’ennemi.

La garnison, les troupes de ligne, la garde mobile et les francs-tireurs de Mirecourt sont faits prisonniers. Le petit fort, à la Vauban, est en ruine. Dans la ville, des quartiers entiers sont détruits. Les cadavres des animaux, chevaux et bœufs qui n’ont pu être sortis à temps, sont restés sur place, a demi-ensevelis sous les décombres. L’air est imprégné des odeurs de mort, de poudre et de fumée des incendies. Sur les 280 maisons de la ville, 125 sont totalement détruites, 140 gravement endommagées. Seules quinze sont miraculeusement intactes.

A Boulogne, l’armée du Nord est en formation. Le 10 novembre, le20e bataillon de chasseurs est formé, sur ordre du général Bourbaki. La plupart des officiers se sont évadés de Metz ou de Sedan. Les chasseurs, quant à eux, sont en partie des engagés volontaires, et pour le reste, des jeunes soldats de la classe 1870, ainsi que quelques anciens soldats rappelés. Ils viennent du Pas-de-Calais, de la Gironde et de la Dordogne. Pour l’instant, l’armée du Nord se limite au seul 22e corps.

A Hébécourt, non loin de Gisors, dans la vallée de la Levrière, quatorze francs-tireurs attaquent une reconnaissance uhlans, vers onze heures du matin. En représailles, vers trois heures de l’après-midi, quatre cents fantassins et deux cents uhlans avec deux pièces de canon arrivent sur le village. L’artillerie couvre littéralement la vallée d’une grêle d’obus, pendant que la cavalerie cerne le village et met le feu à toutes les maisons. Trois fermes et dix maisons sont détruites. Mais il faut que le sang coule, alors ils s’en prennent au curé d’Hébécourt. Ils le font courir sur la colline, en le piquant de leurs lances, jusqu’à ce qu’il tombe une nième fois et qu’il ne se relève plus.

Hebecourt

Christine Lescène - Le Blog d'une Généalogiste - 10 novembre 2020