• Description

Paris - Le plateau de Villejuif sépare la vallée de la Seine de la vallée de la Bièvre. Il fait cinq à six kilomètres de large. Le village de Thiais est à l’est, vers la vallée de la Seine, et plus bas, dans la vallée, se trouve Choisy-le-Roi. A L’ouest, dans la vallée de la Bièvre, se trouve l’Hay et Chevilly.

30septembre

Au matin du 30 septembre 1870, la division de Maud’huy occupe les alentours de Villejuif. L’ennemi est maître de l’Hay, Chevilly, Thiais et Choisy-le-Roi. Cela lui permet une liaison sans risque avec Versailles.

Le gouverneur de Paris a décidé d’envoyer les troupes en reconnaissance, sur les deux rives de la Seine, pour se rendre compte des forces prussiennes et de leurs positions exactes.

Pendant la nuit, des troupes françaises, sous les ordres du général Vinoy, se sont rassemblées vers les forts d’Ivry, de Bicêtre et de Montrouge. Au lever du jour, elles font mouvement.

La droite des troupes longe la crête de la colline au-dessus de la vallée de la Bièvre, entre la redoute des Hautes-Bruyères et le village de l’Hay. Le centre avance à travers champs, directement sur Chevilly. La gauche suit la route de Paris à Fontainebleau, près du Moulin-Saquet.

Le combat s’engage. Les tirailleurs français s’abritent derrière les haies, les fossés de la route qui va de Villejuif à l’Hay, derrière les plantations d’arbre. Pendant ce temps, le 12e d’artillerie tire sur Chevilly.

Les prussiens y sont retranchés et ripostent en utilisant les murs du château et les maisons qu’ils ont crénelées. Rien ne stoppe le 35e de ligne, qui occupe le village de Chevilly, vers huit heures.

L’aile droite française suit la voie des Sablons vers l’Hay. Malheureusement, les bombardements de la veille, depuis le fort de Montrouge, n’ont pas été efficaces. L’ennemi les attend en force et bloque leur avancée.

L’aile gauche fait mouvement sur Thiais. Dans un premier temps, les hommes du 12e régiment de marche réussissent à prendre une batterie placée en avant du village. Mais bientôt, la résistance des prussiens est aussi élevée qu’à l’Hay.

Devant les forces en présence, le général Vinoy ordonne la retraite. Les chasseurs d’Afrique protègent le recul des troupes, pendant que le fort de Bicêtre tire des volées de canons sur le village de Chevilly que les français doivent évacuer.

Les combats ont été violents et les pertes sont énormes.

Au combat de Chevilly, le général de brigade Pierre Victor Guilhem, de l’état-major général, est tué. Il tombe à la tête de sa brigade, frappé de six balles. Son corps sera ramassé sur le champ de bataille par les prussiens, qui, dans un premier temps, vont l’enterrer avec les honneurs militaires. Ils rendront son corps au français qui lui feront des obsèques solennelles à Paris, le 5 octobre. Il avait cinquante-cinq ans.

Le 35e régiment de ligne perd beaucoup d’officier, tué sur le champ de bataille, ou qui mourront dans les jours qui suivent, de leurs blessures : six capitaines, deux lieutenants, deux sous-lieutenants. Onze officiers sont blessés. Au 42e régiment, quatre officiers sont blessés ou tués. Aux chasseurs à pied, dix-huit officiers, au 10e de marche, 5 officiers, au 11e de marche, 7 officiers, au 12e de marche 13 officiers, 2 au 9e régiment de chasseurs à cheval, 1 au 1er régiment de spahis, 1 au 35e régiment de Vendée. Et ce ne sont que les officiers …

Pendant les combats de Chevilly, la brigade Susbielle, sous les ordres du général Blanchard, fait une reconnaissance en avant d’Issy et sur le Bas-Meudon. Pendant cinq heures et demie, ils vont combattre contre trois régiments de la garde prussienne qui vont reculer.

Un bataillon de la garde mobile de la Côte d’or qui prend part au combat, perd huit officiers et trente-deux hommes, blessés ou tués. La flottille du commandant Thomasset les a couverts pendant toute l’opération, en lançant ses obus sur les positions ennemies.

Au Moulin-Saquet, le chef d’escadron Jean Joseph Elzéar Delcros, du 6e régiment d’artillerie est blessé.

Six ambulances de la société de secours sortent de Paris et se rendent sur le champ de bataille. Elles vont ramener les blessés à l’ambulance du Palais de l’industrie.

L’ennemi s’empare de quelques mulets de cacolets, chargés de blessés. Une suspension des combats est accordée, pour enterrer les morts et enlever les blessés. Elle va durer jusqu’au lendemain, midi. L’ambulance n°8 est à Chevilly et l’Hay. Elle relève cent huit blessés et cinquante-quatre morts.

Le champ de bataille est un véritable charnier. Je laisse un aumônier présent décrire ce qu’il a vu

« Hélas ! qui n’a pas vu un champ de bataille couvert de morts et de blessés ne peut pas comprendre ce que c’est que la guerre. Il faut entendre ces gémissements étouffés ; il faut voir ces larmes couler, silencieuses, sur ces joues pâlies ; il faut étudier ces traits, décomposés par l’affreuse souffrance ; il faut contempler ces corps, naguère si beaux et maintenant tordus, broyés, hachés, sanglants ; oui, il faut voir toutes ces choses pour comprendre combien la guerre est épouvantable, et pour bien se rendre compte aussi de l’effroyable responsabilité qui pèse et qui pèsera à jamais sur ceux qui provoquent ou qui, par ambition, entretiennent de semblables calamités (- ) Un mourant que je venais de confesser demande à boire. De l’eau, je guérirais si je buvais de l’eau. Et là pas une goutte, une seule goutte d’eau ! Je regarde, je cherche, je plains le pauvre enfant, et ne pouvant autrement le consoler, je l’embrasse de tout mon cœur. Un Prussien qui nous regardait s’avance. Waser, dit-il, et il tend sa gourde pour faire boire le pauvre français. A côté de ce moribond, un jeune homme de vingt ans à peine faisait entendre des cris déchirants. Sa jambe était fendue, ses os avaient éclaté et ses douleurs étaient intolérables. Il but aussi l’eau du prussien, qui lui tenait la tête et qui, peut-être, avait causé sa blessure au moment du combat. Mais, en ce moment, il ne voyait plus dans son ennemi qu’un malade à soulager. ( - ) L’endroit où j’arrivai était rempli de Français affreusement maltraités par les obus, la mitraille et les balles. Le cœur se soulevait à la vue de tant de sang et de chairs labourées par le feu et le fer. Tous étaient blessés à la tête ou aux jambes. Ils étaient bien de quarante à cinquante, entassés sur de la paille et exposés à un soleil brûlant. Les mauvaises mouches volaient déjà autour de ces infortunés. Pas un de ces hommes ne faisait entendre une plainte. Pas un reproche ne sortait de leurs lèvres blêmies. Ils enduraient tout avec courage, et quel courage, Seigneur ! Un seul cria quand on coupe son soulier pour panser son pied traversé par deux balles et extraordinairement gonflé ( - ) Les blessés furent apportés vers deux heures ou deux heures et demie, et couchés sur des couvertures, à l’ombre, le long du chemin ( - ) Je confessai encore beaucoup de mourants, et entre autres, le brave commandant Martin (2e bataillon ,2e compagnie), blessé au ventre et au pied par deux balles. Il en avait reçu dans tous ses vêtements. Il se tenait immobile, au milieu de la pluie de projectiles, donnant à tous des ordres, quand il tomba. Les voitures des ambulances arrivèrent enfin. On put charger les malades et les diriger vers Paris. »

Sortie sur Créteil et prise de la ferme de Notre-Dame des Mèches. Le capitaine JAM Regnault, du 5e régiment de marche, est blessé. Le sous-lieutenant de la Croix de Castries, du1er régiment de marche de lanciers est blessé. Il décèdera de ses blessures le 14 octobre. Le lieutenant Véricel JF du même régiment, est blessé.

A Clamart, le sous-lieutenant CH Bouchu du 13e régiment de marche, est blessé.

A la redoute des Hautes-Bruyères, quatre-vingt-neuf blessés sont ramenés à l’ambulance du palais de l’Industrie par l’ambulance numéro 12.

Pertes du jour, 1 988 français sont hors de combat.

A Chevilly, François Michel Richard, vingt-quatre ans, natif d’Avesnes, Sarthe, soldat au 35e de ligne, est blessé au bras, à l’avant-bras droit et a le tibia fracturé par balles. Pierre Vallade, vingt-deux ans, natif de Nanteuil, Dordogne, du même régiment, a l’articulation tibio-tarsienne droite fracturée ainsi que tous les os du tarse, par coup de feu. Auguste Louis Larguier, vingt-sept ans, natif de Lyon, soldat au 35e de ligne, souffre d’une plaie par coup de feu au bras gauche, et d’une fracture de la jambe gauche, écrasée par les roues d’un chariot. Victor Cyprien Ardit, vingt-neuf ans, natif de Condom, Gers, caporal au 42e de ligne, a les deux mains emportées et une plaie déchirée au cou, par des éclats d’obus. Il sera amputé de l’avant-bras droit et de la main gauche, un éclat d’obus sera également extrait de son larynx.

A l’Hay, Pierre Mignard, soldat au 10e de ligne, est blessé dans la région dorso-lombaire, par balle. Marius François Paul Mignonneau, dix-sept ans, natif de Nantes, et Louis Mignot, soldats au 109e de ligne, sont tous les deux blessés à la cuisse gauche par coup de feu. Giles Content, soldat au 10e de ligne est blessé par balle à la fesse et à la cuisse droite. Edmond Marie Victor Houssay, dix-neuf ans, natif de Pontlevoy, Loir-et-Cher, soldat au 109e de ligne, a le coude gauche fracturé par balle.

La liste est sans fin et l’examen de certains blessés, ainsi que l’autopsie de certains morts, va révéler l’utilisation par les prussiens, de balles explosives.

L’ennemi est resté maître des villages de l’Hay, Chevilly, Thiais et Choisy-le-Roi.

Le même jour, Paris apprend la reddition de Strasbourg.

En Seine-et-Oise, des engagements ont lieu vers Herbeville, les Alluets et Maule. Le capitaine Lamonta, du 1er régiment d’éclaireurs de la Seine, est blessé lors de l’escarmouche des Alluets.

Beauvais est occupé par les prussiens.

Christine Lescène - Le Blog d'une Généalogiste - 30 septembre 2020