Vous connaissez le principe du tirage au sort militaire ? Tous les jeunes de la classe, réunis au chef-lieu de canton, tirent un numéro au sort, l'un après l'autre.
Plus votre numéro est bas et votre santé haute, plus vous avez des chances de connaître du pays, faire des voyages au frais de l'état, voyage en groupe, entre hommes du même âge. Un voyage organisé comme on n'en fait plus avec activités sportives multiples. Vous partez après les moissons et les vendanges, pour sept ans. Bizarre mais la grande majorité des garçons de vingt ans essayent d'y échapper !!!!
C'est le cas de René Bouvet, classe 1849, qui est fatigué de l'estomac. J'ignore ce qu'il a fait pour cela, mais il est accusé de mutilations volontaires pour échapper au service militaire. Il avait tiré le numéro 16.
En attendant le verdict, les numéros qui partent sont décalés de UN, et c'est Joseph Alexandre Chervy qui en fait les frais. Il a tiré le numéro 36 et l'état réclame quatorze hommes sur le canton. Sur trente-six, vingt-et-un sont HS et un vient de se mutiler !!) .
Joseph Alexandre, clerc d'huissier de son état, doit attendre le verdict du tribunal pour savoir s'il part ou pas pour sept longues années. Et la réponse ne tarde pas à tomber, il n'y aura pas de procès car René Bouvet est décédé avant la date de celui-ci. Joseph Alexandre doit donc partir.
En théorie, parce qu'en réalité, il paye François Aupetit, maçon de la Creuse (de Colondannes plus exactement) pour le remplacer à compter du 13 décembre 1851. Il était temps car toute la classe est déjà partie.
Joseph Alexandre manque quand même de partir car François Aupetit déserte, le 2 mai 1854. Déclaré insoumis, il est rattrapé par la gendarmerie, le 4 juillet 1854. Je dis "manque de partir" car le remplacé ne part à la place de son remplaçant que la première année, si ce dernier fait défaut. Là, la première année est passée.
Ou Joseph Alexandre a la demi-poisse, ou au contraire, il est verni. Tout dépend de quel côté se renverse le verre à moitié rempli.
Christine Lescène - Le Blog d'une Généalogiste - 10 février 2017