Les francs-tireurs de Paris arrivent à Châteaudun. Depuis deux jours, les prussiens sont dans l’Eure-et-Loir. La veille, ils ont envahi Fains-la-Folie, Germignonville, Fontenay-sur-Conie, Patay, Rouvray-Saint-Florentin, Villeau, Poupry, Orgères. Ils sont à Allaines, Oinville-Saint-Liphard, Janville, Toury, Terminiers et Poinville depuis deux jours. Ils ont pointé le bout de leur sabre et fait des réquisitions à Voves, Bazoches-les-Hautes, Viabon.
L’invasion de l’Eure-et-Loir est en bonne voie, un prélude au futur martyr de Châteaudun.
Un habitant de Guillonville qui se rendait à Patay, Narcisse Hardy, essaye de rebrousser chemin en voyant un cavalier prussien. Il est abattu d’un coup de pistolet et mourra un mois plus tard de ses blessures.
A Soisson, la garnison tire de temps en temps sur les positions de l’ennemi. Le faubourg Saint-Crépin continue de bruler, sous les yeux de ses habitants. Il est question d’incendier, pour les mêmes raisons, une partie de Saint-Médard où se trouve un institut de sourds-muets. Mais l’intervention de l’évêque sauve les lieux où deux compagnies de mobiles équipées d’un canon sont installées.
A Montmedy, depuis le premier bombardement, le 5 septembre, il ne s’est pas passé grand-chose. La nouvelle du désastre de Sedan est parvenue à la ville quelques jours après la bataille. Des paysans portant des vêtements en lambeau sont arrivés à Montmedy. Ce sont des soldats de Sedan qui ont réussi à s’échapper. Ils se sont extirpés des colonnes de prisonniers en profitant des étapes au cours du voyage. Les prisonniers sont, à chaque fois, parqués dans les églises, étroitement surveillées par les prussiens. Malgré tout, grâce aux curés et aux habitants des villages, de nombreux officiers et soldats réussissent à s’échapper, par les portes dérobées, les clochers, les greniers, etc.. Aussitôt, les habitants les habillent de vêtements civils, d’abord leurs vieux vêtements. Mais les évadés sont si nombreux qu’il ne reste plus que des hardes en haillon pour les vêtir. Les villages alentours où les colonnes de prisonniers ne passent pas fournissent les villages étapes en vêtements. Beaucoup de ses évadés ont rejoint la Belgique, puis, de là, leurs dépôts ou leurs foyers. D’autres ont rejoint les forteresses les plus proches : Montmédy, Longwy et Verdun, augmentant ainsi les garnisons.
A Montmedy, ils sont 1200 environ à rejoindre la garnison, de toutes armes, dont des zouaves et des turcos. Les casernes sont pleines et il faut loger ces nouveaux arrivants. Ils investissent les maisons abandonnées par leurs habitants qui ont fui vers la Belgique.
Si ces évadés sont pressés d’en découdre avec les prussiens et de venger leur honneur, les mobiles de la place forte ne sont pas dans le même état d’esprit. Jeunes, mal formés, mal habillés et mal armés, beaucoup s’enfuient et rentrent chez eux. Le 6 septembre au soir, il en manque 400, au point que les portes de la ville basse vont être fermées à clés, pour stopper cette hémorragie. Et la ville se prépare.
Pour faciliter la défense et compliquer les actions prussiennes, le viaduc de Thonne-les-Prés saute, une pile et deux arches s’écroulent, couvrant de débris deux maisons voisines, mais les habitants ont été évacués. Le tunnel de Thonne-les-prés subit le même sort, de même que la partie du tunnel côté Longuyon. Les hommes se préparent, et attendent.
A Verdun, trois jours plus tôt, un violent combat d’artillerie a eu lieu. A partir de cette date, un blocus total est organisé par les prussiens. Plus aucune nouvelle de l’extérieur ne parvient à la place-forte.
A Neuf-Brisach, les troupes sont rassemblées. Le 2e bataillon de la garde mobile du Rhône, une compagnie de francs-tireurs de Mirecourt, sont venus grossir la garnison qui s’élève à 5 000 hommes.
Mais la ville est cernée par les prussiens. A chaque sortie tentée par les soldats français, sur les positions prussiennes, ils arrivent trop tard. L’ennemi s’est envolé. A chaque sortie, les prussiens qui surveillent la ville préviennent leurs troupes à coups de canon tirés depuis Vieux-Brisach occupé et par des feux de paille humide en signaux de fumée.
Les places fortes résistent, mais les prussiens les contournent et continuent à rassembler des troupes autour de Paris.
Christine Lescène - Le Blog d'une Généalogiste - 29 septembre 2020