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Les orphelines de Verdes

Les prussiens, en territoire occupé et conquis, logent chez les habitants.

A Verdes, dans le Loir et Cher, comme dans les autres communes, les soldats investissent les maisons et exigent de la population qu’elle les nourrisse.

Le 21 décembre 1870, Constant Hippolyte Reneuve et sa femme, Constance Clément, vivent dans le bourg de Verdes avec leurs six filles, Philomène Alphéna, 15 ans, Elisabeth Onésime, 13 ans, Camille Aurélie Anna, 11 ans, Augustine Alphonsine Constance, 5 ans, Gabrielle Marguerite Rosalie, 2 ans et Germaine Adelphine Alphonsine, 10 mois.

Germaine Adelphine est née le 30 mai 1870, à l’aube d’une guerre qui va lui prendre ses parents.

Un soldat de l’armée prussienne loge chez eux.

Alors qu’il nettoie son révolver près de la cheminée où est assise Constance, un coup de feu part. Constance est tuée.

Les six petites filles ont perdu leur mère. Mais elles ont encore leur père, pour quelques semaines seulement.

Constant décède le 27 février 1871, pour certains de la vérole, pour d’autres de chagrin. Probablement l’un n’a pas aidé l’autre.

A partir de là, les petites filles sont séparées.

Le bébé est mis en nourrice chez Adelphine Beulay, femme de Jules Legrand, journalier agricole à Verdes. Leur fils Désiré a le même âge que Germaine (appelée Alphonsine).

Les trois aînées sont placées comme domestiques à Châteaudun et Verdes. Augustine, 5 ans, vit chez l’oncle Etienne Désiré Clement, leur subrogé tuteur, et sa famille, à Châteaudun et Gabrielle, 2 ans, part pour l’Essonne, vivre chez l’oncle Alphonse Reneuve, leur tuteur, à Tigery.

Le maire de Verdes fait une demande de prise en charge du bébé par les services d’assistance et Germaine est ainsi suivie par les services sociaux jusqu’à ce qu’elle soit rendue officiellement à l’oncle Adolphe Reneuve de Tigery en 1876.

En 1872, la famille demande une aide pour les orphelines auprès des services de l’état. Mais ceux-ci ne prennent en charge que les enfants de moins de douze ans. Les trois aînées sont trop « vieilles » pour être secourues. Elles sont jugées assez grandes pour survivre seules dans un pays dévasté par la guerre et les épidémies !!!

Les deux aînées et la plus jeunes sont d’abord à la charge de l’oncle de Châteaudun et les trois autres à la charge de l’oncle de Tigery. Mais le premier, cabaretier, a lui-même quatre enfants, de 20, 17, 12 et 8 ans. Il fait une demande d’aide qui est accordée par le ministère de l’intérieur qui lui verse 250 francs.

L’oncle Alphonse Reneuve est plus aisé. Il est régisseur du château de Tigery et ne demande aucune aide. Il paye même la nourrice du bébé qui a été envoyé à Cloyes, chez un grand-oncle, Charles Doucet.

A partir de 1876, je perds la trace des deux plus jeunes. Elles ne figurent pas dans les recensements aux domiciles des oncles, malgré leur jeune âge.

 

En 1876, Anne, 17 ans, est placée à Verdes comme domestique chez Alexandre Doucet et sa femme, à Lierville. Philomène et Augustine vivent chez l’oncle de Châteaudun.

Les œuvres de madame Thiers sont dévolues aux orphelines de guerre et les sœurs Reneuve y ont droit. Une dot est allouée à chacune des orphelines par le comité de l’œuvre des orphelines de guerre. Elles la toucheront le jour de leur mariage et justement, l’année 1877 est une année de mariage chez les sœurs Reneuve.

Philomène Alphéna,22 ans épouse, le 19 février 1877 à Châteaudun, Jacques Emile Jolliton et part vivre à Paris.

Camille Aurélie Anne, 20 ans, se marie à Verdes le 20 juillet 1877 avec Louis Armand Chaillou et va y vivre jusqu’à sa mort, en 1943.

Elisabeth Onésime, 18 ans, se marie la même année au même lieu, le 12 septembre avec Adolphe François Chaillou, frère de Louis Armand.

En 1878, leur oncle Etienne Désiré Clément décède et c’est le beau-frère, Adolphe François Chaillou qui le remplace comme subrogé tuteur.

Augustine Alphonsine, 25 ans, se marie le 18 janvier 1890 à Colombes (92) avec Joseph Denis Adolphe Polin. Elle se remarie le 29 juin 1918 à Asnières sur Seine avec François Bachelier.

Germaine décède le 7 avril 1964 à Ivry sur Seine, à l’âge de 93 ans. Que lui est-il arrivé entre ses quatre ans et sa mort ?

Et Gabrielle ? Qu’est-elle devenue ?

Christine Lescène - Le blog d'une généalogiste - 17 juin 2016