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Second siège de Paris :

Les insurgés ont été chassés de leurs positions place du Trône, de la Bastille, du Château-d ’Eau et de la rotonde de la Villette. Ils se sont réfugiés sur les Buttes-Chaumont et les hauteurs du Père-Lachaise, non sans avoir incendié tout ce qu’ils pouvaient.

Leurs batteries d’artillerie tirent sur les troupes régulières à feu violent, mais, depuis trois jours, ces derniers sont installés à Montmartre et leur artillerie répond, balayant les buttes et préparant l’attaque finale.

Les corps de Douay et Clinchant vont tenir les positions défensives du boulevard Richard-Lenoir, et sur le Canal, pendant que le corps Ladmirault et l’armée de réserve attaquera les insurgés en les contournant par l’Est.

Les Buttes-Chaumont et les hauteurs du Père-Lachaise forment deux contreforts, débutant, à l’est, près des remparts, entre les portes de Romainville et de Ménilmontant. C’est là que l’aile gauche du corps Ladmirault et de l’armée de réserve, du général Vinoy, doivent se réunir pour rejoindre les positions des insurgés.

27mai

Le corps Ladmirault se dirige vers les Buttes-Chaumont, en échelons. L’aile gauche est en avant. La colonne échelon de gauche suit la rue militaire, le long des fortifications. C’est la division Grenier qui démarre, à six heures et demie du matin. Elle franchit le canal de l’Ourcq, s’empare du poste-caserne du bastion 26, enlève la porte de Pantin et se rend maître des bastions 24. 23 et 22.

Les autres colonnes se mettent en mouvement, les unes après les autres, chaque fois que l’échelon qui précède prend les hauteurs à leur gauche. Elles s’emparent à leur tour des barricades de la rue de Flandre. La compagnie d’éclaireurs, sous les ordres du lieutenant Muller, prend la mairie du 19e et l’église Saint-Jacques.

La fusillade est vive entre les troupes et l’ennemi embusqué dans les jardins et les maisons de Belleville, pendant que les batteries établies dans les bastions 25 et 24, sur la voie ferrée et en avant du marché aux bestiaux canonnent les hauteurs de Belleville.

La division Montaudon se met en mouvement à onze heures. Sa brigade Dumont tourne le bassin de la Villette en franchissant la place de la Rotonde, enlève les barricades de la rue d’Allemagne et s’installe au marché de la rue de Meaux.

La brigade Lefebvre se concentre dans les rues de la Butte-Chaumont et du Terrage, franchit le canal sous une grêle de balles, enlève la grande barricade du rondpoint et celle de la rue des Ecluses-Saint-Martin, et atteint le boulevard de la Villette par les rues Grange-aux-Belles, Vicq-d’Azir et de la Chopinette.

L’échelon de droite suit les boulevards Davoust et Mortier, le long des remparts et rejoint l’échelon de tête de colonne du corps Ladmirault, entre les rues de Belleville et de Ménilmontant.

Réunis, toutes les colonnes font mouvement vers l’ouest, enveloppant les insurgés et les rejetant vers le canal Saint-Martin et le boulevard Richard-Lenoir, où les attendent les corps Douay et Clinchant.

Il est six heures de l’après-midi. Les brigades Lefebvre, Dumont et Abbatucci sont rangées en demi-cercle au pied des Buttes-Chaumont. La brigade Pradit a atteint le bastion 21 où l’artillerie installe une mitrailleuse et une pièce de 12, prenant les buttes à revers.

La charge est sonnée. Les troupes s’élancent à l’assaut, s’emparent des carrières d’Amérique, des hauteurs de Belleville et du sommet des Buttes-Chaumont où le régiment étranger (c’est un sacré symbole), plante le drapeau tricolore.

L’armée de réserve s’est également mise en mouvement, mais avance avec beaucoup de difficultés. La brigade La Mariouse est en avant et se dirige le long des fortifications. La brigade Derroja reste en réserve sur le cours de Vincennes. La brigade Bernard de Seigneurens formant les échelons en arrière s’avance par la rue Puébla et s’empare de toutes la barricades.

Un bataillon du 1er régiment d’infanterie de marine s’avance contre une barricade et atteint le Père Lachaise, malgré une défense énergique des fédérés. Avec l’aide de deux bataillons de sa brigade et un régiment de la division Faron, ils réussissent à se maintenir dans le cimetière et à en prendre possession.

Pendant ce temps, la brigade Langourian remonte jusqu’à la place du Trône et désarme les quartiers environnants.

Mais la place Voltaire est fortifiée et l’artillerie des insurgés tire à mitraille sur la place du Trône. Six pièces d’artillerie installées sur cette dernière suffisent au général Faron pour reprendre l’avantage.

Le général La Mariouse poursuit son avancée par la route militaire, s’empare de la porte Bagnolet et de la mairie du 20e.

Depuis la place de la Bastille, un feu d’artillerie est dirigé sur la mairie du 11e et sur l’église Saint-Ambroise par les hommes du corps Douay. Les positions le long du boulevard Richard-Lenoir et du canal Saint-Martin sont consolidées et des batteries sont installées pour contrer les insurgés qui franchiraient la ligne de bataille.

Le soir venu l’armée est maîtresse des Buttes-Chaumont et du cimetière du Père-Lachaise. La ligne de bataille forme maintenant les trois quarts d’un cercle s’appuyant au bastion 21 à gauche et à la porte de Bagnolet à droite.

Pendant ces combats, sur la rive gauche aux mains de l’armée, les troupes du général de Cissey désarme la population.

L’ambulance volante du marquis de Hertfort est place du trône, au Père-Lachaise et à la Roquette. Un des cochers de l’ambulance, traumatisé par les scènes d’horreur auxquelles il a assisté en devient littéralement fou.

A l’hôpital temporaire du château de Ville d’Avray, les blessés laissés à Saint-Antoine et au Gros-Caillou arrivent, quinze amputés dont six de la cuisse. Depuis le 25 avril et jusqu’au 1er juillet, quatre-vingts blessés dont neuf officiers vont y être soignés.

Pierre Cousin, vingt-quatre ans, natif de Jumelle, Maine-et-Loire, soldat au 54e de ligne, est blessé par un coup de feu. Il perd le testicule gauche, le canal de l’urèthre et une partie du gland. François Dumas, vingt-trois ans, de Treteau, Allier, soldat au 6e régiment d’infanterie provisoire est touché à l’œil droit par un coup de feu. Jacques Guillon, soldat au 48e de ligne, a le maxillaire gauche fracturé par un coup de feu. Il perd toutes les dents du côté gauche. Henri Benjamin Guy, trente-un ans, de Niort, Deux-Sèvres, sergent au 5e provisoire est également touché à la face. Il a la voûte palatine perforée et perd une partie du maxillaire et des dents, par un coup de feu. Jean Heidinger, du 15e d’artillerie, est blessé par la chute d’un caisson qui lui fracture le fémur droit. Hyacinthe Hubert Rousseau, vingt-deux ans, de Chaillié sur Ormeaux, Vendée, caporal au 37e de ligne est touché à la poitrine par un coup de feu qui lui fracture plusieurs côtes.

A la prison de la Roquette, alors que l’armée régulière s’approche des hauteurs du Père-Lachaise, le délégué de la Sûreté Générale, Ferré, membre de la commune, donne l’ordre d’exécuter les prêtres, les soldats et les sergents de ville qui y sont enfermés. Il commence par le premier étage.

Dans le même temps, tous les prisonniers de droit commun, condamnés du pénitencier qui attendaient leur transfert au bagne, sont libérés. Des armes et des uniformes leurs sont donnés.

Le massacre continue avec les soixante-six gendarmes encore détenus dans la prison. Seuls six survivent. Ils sont à l’infirmerie et on les y a oubliés.

A trois heures et demie, Ferré décide de s’attaquer aux deuxième et troisième étages de la prison. Mais l’un des gardiens, probablement écœuré par ces massacres, décide de résister. M. Pinet ouvre toutes les cellules et les prisonniers, armés de tout ce qu’ils ont pu trouver pour se défendre, barres de fer ou de bois, établissent des barricades à l’entrée des portes du troisième étage. Une ouverture est pratiquée au plancher qui communique avec le second où sont enfermés les sergents de ville. Sous la direction du gardien Pinet et d’un zouave prisonnier, le pavillon de l’Est se transforme en camp retranché.

Les fédérés tentent de les déloger, mettent le feu aux barricades, les menace en vain. De toute manière, les prisonniers savent qu’ils seront exécutés s’ils cèdent.

La population pro-commune assiège la prison sans succès. En leur promettant la vie sauve, ils réussissent à faire sortir quatre prêtres et dix-huit soldats qui sont immédiatement fusillés contre un des murs de la prison. Les corps des quatre prêtres sont exhibés sur la barricade voisine. En tout, soixante-quatre otages sont exécutés à la Roquette et il en reste encore cent soixante-neuf, barricadés dans les étages, qui attendent l’arrivée de l’armée.

Outre les otages exécutés, les irréductibles de la Commune continuent leur œuvre de destruction. Les Magasins-Généraux et des théâtres sont incendiés.

A Mayence, en captivité, Jean Batiste Aubin, garde mobile de la Côte-d’Or, décède de phtisie. Jean Rousseau, de Fontaine, Charente-Inférieure, de l’artillerie de la garde, décède du typhus.

Christine Lescène - Le Blog d'une Généalogiste - 27 mai 2021