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A Paris, et autour, chaque jour, les trains d’ambulance prussienne passent, trois fois par jour, sur le chemin de la ceinture. Chaque train évacue 1 200 blessés. Cette évacuation vers l’Allemagne, a commencé le 11 février. Les premiers venaient de Versailles, puis du Mans, et d’Orléans. Depuis la gare d’Ivry, ils gagnent la ligne de l’Est par la Ceinture. Depuis un mois, c’est 110 000 blessés et malades qui ont été évacués. Ces chiffres ne comptabilisent que les trains de jour.

Le 13 mars, le journal du Loir-et-Cher relate une catastrophe qui a eu lieu trois jours plus tôt, à Puteaux. Un train d’ambulance prussienne, composé de trente-trois voitures remplies de soldats blessés arrivait en vue de la gare. Elle rapatriait ces hommes dans leur pays. Il était sept heures.

 

13mars

 

Au même moment, un train de marchandises arrivait à toute vapeur. Le mécanicien du train d’ambulance, voyant le danger, tenta d’accélérer sa vitesse mais ne réussit qu’à briser les chaînes qui reliaient les wagons 13 et 14, par trop de traction.

Si les treize premiers wagons suivirent la locomotive dans la gare, les vingt derniers restèrent bloqués sur la voie. Ils avaient déraillé, même si les douze premiers sont restés debout. Les huit deniers sont renversés. C’est alors que le train de marchandise, lancé à pleine vitesse, les a percutés de plein fouet. Il était 7h08 du soir.

Le choc fut terrible. La locomotive a pulvérisé le dernier wagon, est passée par-dessus les trois suivants qu’elle a littéralement broyé, a défoncé les cinq suivants avant de se coucher sur le flanc.

Le rappel a été battu dans tout le village, mais, en apprenant qu’il s’agissait de prussien, la grande majorité des habitants est retournée chez elle.

Les secours se sont organisés néanmoins, avec les employés de la gare et ceux arrivés en hâte de Paris. Il y avait quatre-vingts soldats blessés, plus le personnel de l’ambulance, dans les wagons pulvérisés.

Dix morts ont été retirés des derniers wagons. Il a fallu six heures pour dégager les blessés du lieu de l’accident.

Le corps du chef du train de marchandise, nommé Sautereau, sera retrouvé, écrasé par le tender de sa machine. Agé de près de cinquante-deux ans, marié à Louise Bonnard, originaire de Saint-Moré, dans l'Yonne, Etienne était conducteur au chemin de fer de l'Ouest. Son corps a été transporté et déposé 17  rue d'Amsterdam, à la gare Saint-Lazare.

Dans l’un des derniers wagons se trouvait le corps d’un général prussien, mort des suites de ses blessures. Son corps, rapatrié dans son pays, reposait dans un double cercueil de chêne et de plomb, en uniforme de parade. Il sera retrouvé intact, même si le cercueil de chêne a été pulvérisé et celui de plomb complètement tordu.

A Blois, les derniers soldats et officiers allemands quittent la ville. Ils étaient logés à la Trésorerie général et chez les particuliers. Blois est enfin libre.

Quelques heures plus tard, une garnison française entre dans la ville, venant des Montils, et composée de 39 officiers et 1 351 hommes du 43e régiment de marche. Mais, conformément au traité, ils ne peuvent traverser la Loire tant que les premiers 500 millions n’ont pas été payés. Ils vont devoir rester dans le faubourg de Vienne, logés par les habitants.

A Bitche, la dépêche de Jules Favre ne suffit pas au commandant Teyssier. Pour lui, il faut un ordre du ministre de la guerre. Il en informe les allemands qui doivent en trépigner de rage devant l’obstination de ce français, qui suit, à la lettre, le règlement militaire. Mais qui pourrait le lui reprocher ?

En réalité, un codicille a bien été ajouté, spécial à Bitche, le 11 mars, mais le gouvernement a négligé l’envoi de ce document, pourtant important.

En attendant, le conseil de défense décide de continuer à démanteler la place forte. Le vieux matériel, une partie des vivres, les matériaux de démolition, les armes hors service sont vendus aux enchères. La plupart de ces débris sont achetés par l’usine métallurgique de Niederbronn.

Les soldats achèvent de détruire tout ce qu’ils peuvent, arrachent les portes, les fenêtres, enlèvent jusqu’aux palissades des avancées, aux grilles de fer qui bordent les pont-levis.

A Mayence, en captivité, Louis Thomas, du Loir-et-Cher, zouave de la garde, décède de pneumonie après trois semaines d’hospitalisation.

Christine Lescène - Le Blog d'une Généalogiste - 13 mars 2021