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Orléans : Le 12 octobre 1870, après les combats sanglants de la veille, l’armée allemande s’installe dans Orléans et commence ses réquisitions : 600 bestiaux, 50 000 kg de pain, 200 000 kg d’avoine, 100 000 kg de foin, 200 000 litres de vin, 20 000 kg de tabac, 300 000 cigares, 4 000 kg de sucre, de café et de sel. Et ainsi de suite sans oublier une contribution d’un million de francs à fournir dans les vingt-quatre heures. A ces réquisitions vont s’ajouter des réquisitions quotidiennes de denrées alimentaires pour nourrir l’armée allemande. Il faudra l’intervention de monseigneur Dupanloup, l’évêque d’Orléans, pour les taxes en natures soit supprimées en échange de 600 000 francs, suivis de 400 000 francs le mois suivant. Au moment de ce dernier règlement, le général von der Tann accordera une remise de 100 000 francs, pour indemniser les habitants du faubourg des Aydes, dont les maisons ont été incendiées et pillées le 11 octobre.

Cela n’empêchera pas la ville de recevoir quotidiennement des réquisitions de toutes natures.

Après la défaite du 11 octobre, le général Maurandy qui occupe la forêt et garde les routes de Chilleurs et de Saint-Lyé, bat en retraite par Bellegarde, Lorris et arrivera, le 14, à Gien.

Pourquoi n’a-t-il pas participé aux combats d’Artenay et d’Orléans ? Il avait reçu l’ordre de ne pas quitter ses positions. Bien qu’il ait entendu les bruits de canonnade sur Artenay et Orléans, il a attendu d’autres ordres qui ne sont jamais venus. L’état-major a tout simplement oublié qu’il était là, tout près, prêt à se battre !!! C’est dans la nuit qu’un émissaire lui est enfin parvenu avec l’annonce de la chute d’Orléans et de son occupation par les prussiens.

Les troupes de la garde mobile du Loiret, en dépôt à Vitry-aux-Loges vont être dans la même situation. Ils apprennent, le 12 au matin, l’occupation de leur préfecture, sans qu’il leur soit donné aucun ordre de marche. Ils partent pour Gien où ils retrouvent les hommes du général Maurandy.

Les troupes qui ont évacué Orléans, avant d’être capturés, se séparent. Une partie rallie la Ferté-Saint-Aubin, avant de rejoindre Lamotte-Beuvron. L’autre part pour Gien. Les débris du 39e de ligne et de la légion étrangère arrivent à La Ferté-Saint-Aubin, vers une heure du matin, le 12 octobre.

C’est là que le général de La Motterouge apprend que Léon Gambetta le relève de ses fonctions. Son successeur arrive le lendemain 13 octobre, le général d’Aurelle de Paladines. C’est un vieux soldat, qui a fait les campagnes d’Afrique et de Crimée. La guerre le tire de sa retraite et le propulse à la tête du 15e corps d’armée.

Breteuil

Dans l’Oise, le 4e bataillon de la Somme est attaqué à Breteuil, par un corps de 4 500 prussiens, 12 pièces d’artillerie et environ 1200 cavaliers. Les avant-postes français de Vandeuil et Caply doivent se replier sur le bataillon formé en bataille, en avant de Breteuil.

Les prussiens installent deux batteries sur les hauteurs de Caply et de Vandeuil, et bombardent Breteuil pendant que la cavalerie contourne la ville, pour empêcher la retraite du bataillon sur Amiens. De onze heures du matin, début de l’attaque jusqu’à deux heures de l’après-midi, quatre compagnies françaises maintiennent leur position face à l’infanterie allemande qui tente d’arriver à Breteuil par les routes de Paris et de Beauvais. Les quatre autres compagnies sont dans la plaine, entre Breteuil et Equesnoy, tenant tête à la cavalerie prussienne qui ne réussit pas à leur faire rompre les rangs, malgré plusieurs charges.

Plusieurs détachements de gardes nationaux tentent de rejoindre les mobiles de la Somme, mais se heurtent aux prussiens. Capturés, ils s’échappent grâce aux tirs des mobiles. Un épais brouillard règne sur le champ de bataille.

La confusion règne, les prussiens continuent à bombarder Breteuil pendant une-demi-heure, alors que le drapeau parlementaire a déjà été hissé sur leur ordre, au clocher de l’église retardant l’entrée dans la ville, de leurs propres troupes. Cela permet aux deux compagnies de la Somme restée sur le secteur, de se retirer vers le nord et de gagner Paillart en traversant les bois et les marais.

Les tirs cessent à une heure et demie. Les prussiens investissent Breteuil, y laissent une compagnie et partent à la poursuite des mobiles de la Somme.

Vers trois heures de l’après-midi, tout le bataillon est replié sur Esquesnoy, canonné par les prussiens. Ces derniers, arrivés dans Breteuil, installent quatre pièces d’artillerie et pilonne à leur tour le village, alors que le bataillon bat en retraite, compagnie par compagnie, sur Bonneuil.

La cavalerie prussienne tente de bloquer la retraite, en vain. Le bataillon gravit la montagne Galets et se range de nouveau en ordre de bataille, sur la route de Paris à Amiens. Il est quatre heures trente. Mais les prussiens ne les poursuivent pas, se contentant de faire tirer l’artillerie sur les bois de Bonneuil où ils croient, à tort, les français embusqués. Après une nuit à Flers, le bataillon se retirera sur Hébécourt. Pendant les combats, le bataillon a perdu soixante-deux hommes, tués, blessés ou prisonniers. Onze sont blessés, dont le capitaine MAR Blin de Bourdon, et cinquante-quatre sont faits prisonniers, dont trois officiers. Un garde national de Bonneuil est tué et trois gardes nationaux de Blancfossé sont grièvement blessés. Théophile Beauvais, vingt-cinq ans, natif de Talmas, garde mobile de la Somme a le bras gauche fracturé par balle.

Le peu de perte est largement dû à la conjonction brouillard épais (les prussiens ont cru les français plus nombreux qu’ils n’étaient), au terrain détrempé (les obus n’éclataient pas), et à la mésentente entre les différents régiments allemands.

Epinal : l’ennemi arrive devant Epinal. Après un combat où une poignée de francs-tireurs et la garde nationale sédentaire se sont opposé à l’entrée des prussiens, les troupes badoises finissent par pénétrer dans la ville. Dans la garde nationale sédentaire, le chef de bataillon Martin est blessé, ainsi que le capitaine Sibien, et le  sous-lieutenant Enard.

A Soissons, le 12 octobre, à 6 heures du matin, l’artillerie allemande ouvre le feu simultanément de Sainte-Geneviève, du chemin de

Soissons-2

fer sur la route de Fère-en-Tardenois et du Mont-Marion. Un duel d’artillerie commence entre les prussiens et les assiégés. Comble de l’ironie, dix des mortiers qui tirent sur la citadelle sont français. Ils ont été prises à Toul et Marsal, où les militaires en place ne les ont pas détruites. Ils en seront jugés après la guerre. 9 500 hommes cernent Soissons, sous les ordres du grand-duc de Mecklembourg.

Le commandant de l’artillerie de Soissons, Roques-Salvaza, a bien placé ses pièces, malgré le peu de ressources à sa disposition. Il se retrouve à combattre, artillerie contre artillerie, à un contre quatre.

A six heures du matin, les hommes sont encore au café. Le bombardement les réveille brutalement. Les tentes qu’ils occupaient quelques minutes avant sont touchées par les obus. Très vite, ils prennent leurs positions et ripostent. Les tirs sont corrigés, et tous les hommes sont à leur poste pour ce duel d’artillerie. Le spectacle est épouvantable, terrifiant. Le bruit d’abord : le sifflement sinistre des obus, les détonations lorsqu’ils heurtent leur cible, les détonations au départ et les détonations à l’arrivée sont assourdissantes.

Ensuite, il y a les dégâts : le feu et le sang. Les obus allument des incendies qui détruisent les maisons, quand ils ne les ont pas, auparavant, broyées dans l’impact. Tout le front sud de la place avec les bastions 3 et 4, la courtine et toute la partie du quartier Saint-Martin, l’arsenal, les tours Saint-Jean, sont les principaux objectifs pilonnés par l’artillerie prussienne.

La Cathédrale, la grande caserne, la petite, transformée en ambulance, l’hôpital sont aussi dans leur ligne de mire, malgré le drapeau de la Convention de Genève.

Vers dix heures du matin, la pièce de 24 du cavalier 27, malgré la forte traverse qui la protège, reçoit un obus sur le côté droit de l’affût, qui se brise en éclatant. La lourde pièce de 3600 kg tombe. Le deuxième servant de droite a les deux jambes broyées (il mourra le lendemain), le premier servant de gauche, les côtes enfoncées, le deuxième se retrouve le bras droit pris sous l’énorme culasse, le premier servant de droite, étendu contre le parapet, en perd la raison. Les rescapés, une fois le choc passé, se remettent au travail. Ils transportent les blessés à l’hôpital, reprennent leur poste sur les autres pièces. Les pertes continuent. Le mobile du Nord, Flouquet, est tué au bastion 6. Plusieurs servants sont blessés au bastion 4, près de l’ancienne poudrière, un mobile du 2e bataillon a un bras et une jambe brisés, des pièces d’artillerie sont brisées, endommagées, le dépôt de fourrage sous les tours Saint-Jean prend feu. Et les hommes résistent.

Vers midi, l’intensité des bombardements prussiens diminue comme la réponse des français. Le maréchal des Logis Georges Marie Olannier, vingt-cinq ans, du 8e d’artillerie, qui commande une des pièces, est atteint par un obus qui lui fracture les deux jambes. Il décèdera le 27 octobre. Si les soldats français souffrent, il en est de même des soldats prussiens, les tirs français étant redoutables de précision.

Le bombardement dure toute la journée. A la nuit tombée, le feu ralentit. Les hommes en profitent pour réparer ce qui peut l’être. Si les tirs sont moins nombreux, ils continuent toute la nuit.

Orléans, Soissons, Breteuil, Epinal, la guerre continue.

Christine Lescène - Le Blog d'une Généalogiste - 12 octobre 2020