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l’ennemi avance sur Paris. Trois corps d’armée ont pris la direction de la capitale française.

Il n’y a plus de communication télégraphique avec Epernay et Château-Thierry. L’ennemi est à Saint-Dizier et Vitry. Demain, il sera à Château-Thierry, Montmirail et Sézanne.

En revanche, les communications continuent avec Mezières, Epinal et Mulhouse.

Paris n’a aucune nouvelle du maréchal Bazaine. La rumeur de la mort du maréchal Mac-Mahon circule, sans que rien ne vienne la confirmer ou l’infirmer.

La dernière partie du 13e corps arrive à la capitale. Les troupes sont cantonnées avenue de la grande-armée, nom prédestiné, depuis l’Arc-de-Triomphe jusqu’au pont de Neuilly. Pendant la retraite, ce corps a perdu près de trois cent cinquante hommes (tués, blessés ou disparus).

Le premier bataillon des francs-tireurs de Paris, environ mille trois cents hommes, quitte la capitale, par la gare de Lyon.

Le 95e de ligne est à Metz. Le docteur Coste, de l’ambulance du 95e écrit : temps affreux, pluie continuelle et feu incessant des forts Saint-Quentin, Queuleu et Saint-Julien, jusqu’à neuf heures du soir. De fait, l’ennemi commence une violente canonnade sur toute la ligne.

La nourriture manque. Depuis la veille, des distributions de viande de cheval ont lieu.

Ce 9 septembre, le 3e régiment de chasseurs d’Afrique parqué à Glaire, quitte la France pour la captivité, en Allemagne.

C’est également le temps des justifications. Les officiers supérieurs qui ont rendu les armes à Sedan, écrivent « leurs mémoires ». Ils savent qu’ils vont être jugés, lorsque la guerre sera finie et qu’ils seront rentrés chez eux.

L’histoire va les juger, certes, mais leurs contemporains vont le faire bien avant.

Un des corps d’armée prussien est arrivé à Soissons.

Son avant-garde, est arrivée aux portes de Laon, qui résiste puis se rend.

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Le garde du génie Dieudonné Henrion n’est visiblement pas d’accord. Il met le feu à la poudrière de la citadelle au moment de la signature de la reddition.

26 000 kg de poudre sautent.

Les portes, les murailles, les bâtiments sont abattus. Les pierres et les poutres, lancées par la force de l’explosion, tombent dans les quartiers alentours et fracassent les toitures, les fenêtres.

Les arbres sont coupés, écrasés et de nombreux habitants sont blessés. Trois cents gardes mobiles sont tués ou blessés, ainsi qu’une centaine de prussiens. Les signataires ont été touchés.

Le duc de Mecklembourg, côté prussien, n’est que légèrement blessé à la jambe. Le général Théremin, côté français, est grièvement touché à la tête. Il en mourra, après des semaines de souffrances.

Il a juste le temps, avant d’être emmené à l’ambulance, de déléguer ses pouvoirs au préfet de l’Aisne, Joseph Ferrand.

Les prussiens sont furieux, mais le colonel Von Alvensleben a compris que les français étaient aussi des victimes et, grâce à son intervention, évite à la ville, des représailles.

Dans la citadelle, le spectacle est épouvantable. Des monceaux de corps, des mourants qui se traînent sur le sol, cherchant en vain un secours, des blessés gravement atteint et la pluie, qui tombe à torrent.

Très vite, les employés de la préfecture, le docteur Guipon, l’abbé Baton, aumônier de l’hôpital et d’autres religieux, des ouvriers, des femmes de la ville, s’affairent auprès des survivants.

Du côté des français, onze officiers et deux cents mobiles sont morts ou disparus, dix officiers et cent cinquante soldats sont blessés. Du côté prussien, on compte trente morts, dont deux officiers et soixante-cinq blessés. Par son acte, que certains qualifieront d’héroïque et patriotique, Henriot a tué plus de français que de prussiens.

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Alors que la reddition devait protéger les civils en leur épargnant des bombardements, l’explosion de la poudrerie a fait plus de ravages.

Dix fonctionnaires et notables de la ville sont pris en otage par les prussiens, pour la sûreté des troupes allemandes. Le préfet et le maire se portent volontaires. Le président du tribunal civil, M. Combier, le directeur des contributions indirectes, M. Lemaire, et M. de Sars les rejoignent, à l’hôtel de la Hure où le commandant de place allemand vient d’installer ses bureaux.

Le préfet, qui, depuis le 4 septembre et le changement de gouvernement, n’est plus officiellement le préfet de l’Aisne, est emmené prisonnier, d’abord à la forteresse d’Ehrenbreitstein, puis, sur parole, à Coblentz, où il restera jusqu’au 31 janvier.

Il est libéré en même temps que le préfet de Strasbourg. A son retour en France, en passant par la Belgique, il rentre à Amiens retrouver sa famille.

Durant sa captivité, il s’est occupé des soldats prisonniers, leur distribuant les secours qu’il recevait, pour eux, envoyés par les comités de Suisse et de plusieurs villes de France, dont Marseille.

En mars 1871, lors de la réorganisation des préfectures, en reconnaissance de son travail et de son sacrifice, le gouvernement le nommera préfet du Calvados.

Officier de la légion d’honneur, Louis Eugène Joseph Ferrand, de son nom complet, né le 4 mai 1827 à Limoges, décèdera à Paris, le 13 mai 1903.

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En ce qui concerne Dieudonné Henriot, une plaque en bronze, à sa mémoire, se trouvait dans la citadelle

« A la mémoire de Henriot (Dieudonné), garde d’artillerie, qui s’est enseveli sous les ruines du magasin à poudre de Laon en 1870 ». 

Christine Lescène - Le Blog d'une Généalogiste - 9 septembre 2020