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8 septembre 1870, la guerre continue.

Strassburg_vom_Steintor_aus_28_Sept_1870

A Strasbourg, malgré les bombardements, les services de l’état civil fonctionnent à plein régime et la loi n’est plus vraiment respectée. Les décès de plus de trois jours sont consignés dans les registres. Cette loi-là peut attendre.

Il va y avoir quarante-cinq actes de décès rédigés ce 8 septembre : vingt-quatre pour des civils, vingt-et-un pour des militaires.

Trente-neuf personnes vont mourir le 8 septembre 1870, à Strasbourg, dont dix-neuf militaires.

A quatre heures du matin, Felix Wagner, 38 ans, soldat de la garde mobile du Bas-Rhin, né à Molsheim, décède au château impérial. Il n’est pas le seul de Molsheim, à mourir à Strasbourg. Joseph Kieffer, vingt ans, soldat au 18e de ligne, y mourra le 24 septembre.

A la même heure, Etienne Callandre, vingt-sept ans, natif de Fleurignac, domicilié à Tassonnat, Charente, soldat au 87e de ligne, décède hors la porte de Pierres

A dix heures du matin, le soldat Klomann, du 5e régiment d’artillerie, décède à l’hôpital militaire. N’ayant pas plus de renseignements sur lui, impossible de trouver sa transcription de décès ou ses origines.

A onze heures du matin, Aloyse Weiss, quarante et un ans, natif de la Wantzenau (Bas-Rhin), brigadier au 16e régiment d’artillerie Pontonnier, décoré de la médaille militaire, décède, hors la porte de Saverne.

A Midi, Charles Wacker, vingt-un ans, natif de Andlau (Bas-Rhin), soldat artilleur de la marine, décède 2 rue des frères. Autre natif d’Andlau à mourir à Strasbourg, Ignace Guth, cinquante-cinq ans, soldat à la compagnie franche, décède le 1er octobre au grand-séminaire.

A la même heure, Jean Marie Panel, vingt-trois ans, natif de Doizieux et vivant à la Grand-Croix (Loire), soldat au 16e régiment d’artillerie, pontonnier, décède hors de la porte de pierre,

Antoine Weiss, 2e canonnier servant à la 3e batterie du 5e régiment d’artillerie, matricule 7244, décède à l’hôpital militaire. Sans autre renseignements, je n’ai pas trouvé sa transcription de décès.

Pierre Lefort, vingt-quatre ans, natif de Buxerolles, domicilié à Chambain en Côtes-d’Or, soldat au 5e régiment d’artillerie, décède, place de l’hôpital militaire.

A une heure du soir, François Xavier Colimmaire, vingt-huit ans, natif de Frison, Vosges, soldat au 13e bataillon de chasseurs à pied, décède à l’hôpital militaire. Son acte de décès sera transcrit, à Frizon, le 10 juillet 1871. Neuf jours plus tard, son frère, Nicolas, viendra déclarer la naissance de son fils, Joseph. Les deux actes sont à la suite, l’un de l’autre, dans le registre.

A cinq heures du soir, François Auguste Kayser, soldat au 1er régiment d’infanterie de marine, domicilié à Benfeld, Bas-Rhin, décède à l’ambulance du grand séminaire.

A six heures du soir, Ferdinand Génor, natif de l’Aisne, soldat au 87e de ligne, décède à l’ambulance du grand séminaire. Je n’ai pas trouvé sa transcription de décès. Il est possible qu’il s’agisse de Ferdinand Genard, né en 1843, à Vervins, dans l’Aisne.

A sept heures du soir, le soldat Billot, du 12e régiment d’artillerie, immatriculé 5342, décède à la porte de Pierre. Avec si peu de renseignements, je n’ai pas trouvé sa transcription de décès ni ses origines.

A huit heures du soir, Ernest Kachlin, vingt-un ans, natif de Schirmeck, Vosges, domicilié à Rothau, Bas-Rhin, soldat au 16e régiment d’artillerie pontonnier, décède à l’ambulance du grand séminaire.

Il est neuf heures du soir, une bombe tombe sur le bastion numéro 9, tuant le capitaine des pontonniers Epp, avec un maréchal des logis et sept hommes. Six seulement ont un acte de décès de dressé à l’état civil.

Delouche, soldat au 47e de ligne, décède à neuf heures du soir, rue Saint-Etienne

Constant Alfred Epp, quarante ans, natif de Strasbourg, capitaine au 16e régiment d’artillerie pontonnier, chevalier de la légion d’honneur, époux de Marie Madeleine Franck, décédé à neuf heures du soir, hors la porte de Saverne,

Joseph Angst, trente-deux ans, natif d’Ebersmunster, maréchal des logis au 16e régiment d’artillerie, pontonnier, décède à neuf heures du soir, hors la porte de Saverne. Il a reçu un éclat d’obus à la région cervicale antérieure droite. La carotide est lésée il va succomber à une hémorrhagie massive, alors que le médecin essaye de ligaturer l’artère. Je n’ai pas trouvé trace de la transcription de son décès.

Elidore Camille Levrien, vingt-six ans, natif de Domart sur la Luce, Somme, maitre ouvrier au 16e régiment d’artillerie pontonnier, décès à neuf heures du soir, hors la porte de Saverne.

Joseph Alphée Dubois, vingt-trois ans, natif de Rumigny, domicilié à Prouzel, Somme, soldat au 16e régiment d’artillerie, pontonnier, décède à neuf heures du soir, hors la porte de Saverne.

Alphonse Fried, soldat de l’artillerie de la garde nationale mobile, décède à neuf heures du soir, à l’hôpital militaire. Je n’ai pas trouvé sa transcription de décès, n’ayant pas d’autres renseignements sur lui.

Et il y a les blessés.

Le 8 septembre, Hamon-ben-Saad, du 3e tirailleurs algériens, est amené à l’hôpital militaire. Il a été blessé deux jours plus tôt, d’une balle qui a atteint le bord supérieur de la rotule gauche. Il vient d’une autre ambulance de la ville. Le 20 novembre, son état ne s’est toujours pas amélioré.

Le maréchal des logis Léopold Palangié, vingt-quatre ans, natif de Decazeville, Aveyron, du 1er régiment du train d’artillerie, blessé le 7 septembre par un éclat d’obus, a le péroné fracturé au tiers inférieur avec juste une petite plaie. Le 8 septembre, la gangrène a envahi toute la jambe, jusqu’à la cuisse. Il est amputé le lendemain, et mourra le 24 septembre, à l’hôpital militaire.

Dumont Eugène Denis, vingt-six ans, natif de Paris, du 21e de ligne, âgé de vingt-cinq ans, a le pied gauche broyé par un obus, le 8 septembre. Il doit subir une amputation du pied. Evacué le 19 octobre sur Bâle où il va rester jusqu’au 21 novembre, il guérit. De retour à Paris, le 1er juillet 1871, il devient pensionné de l’état, pour son infirmité.

Théophile Toussaint Houillot, du 5e d’artillerie, souffre d’une plaie contuse à la fesse droite, par éclat d’obus. Il en gardera une vaste cicatrice adhérente.

Antoine Voegelé, vingt-et-un ans, de Minversheim, soldat au 87e de ligne, est amputé de la jambe, après un coup de feu qui lui a fracturé. Le 1er août 1871, il est pensionné de l’état pour son infirmité. Le 1er juillet 1872, installé à Nancy, il opte pour la nationalité française.

A Strasbourg, des morts, des blessés, il en est ainsi chaque jour, depuis le début des bombardements. Il en sera ainsi chaque jour, jusqu’à la reddition de la ville.

Mais pas uniquement. La vie continue et quatre naissances sont déclarées à l’état civil, ce 8 septembre, et trois enfants voient le jour.

A quatre heures du matin, au 10 rue de la croix, naît Berthe Schott.

A midi, 8 rue Sainte Barbe, naît Gustave Jules Freyss. Il vivra jusqu’en 1952.

A quatre heures du soir, au 21 rue militaire des payens, naît Charles Grauss. Il décède vingt-et-un jours plus tard, à l’hôpital civil.

Etonnant début dans la vie pour ces enfants. Gustave Jules Freyss, né au milieu des bombardements, verra deux autres guerres, mondiales celles-là, avant de fermer les yeux, définitivement.

Christine Lescène - Le Blog d'une Généalogiste - 8 septembre 2020