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Cela fait 34 jours que la guerre a été déclarée. En Loir-et-Cher, la presse locale informe la population que le conseil de révision se réunira le 22 août, à une heure de l’après-midi, à la préfecture. Il devra statuer sur les dispenses au titre de soutien de famille des hommes de la garde mobile.

Ceux qui veulent se faire remplacer peuvent le faire, ils ne seront pas appelés pour la garde mobile. La mutualité générale de Loir-et-Cher informe les familles qu’avec un versement de 1 500 francs ( 275 francs en premier règlement) permettra à leur fils d’échapper au service militaire, et donc à la guerre. Dans la même colonne, se lisent deux petites annonces : un homme de 38 ans souhaite remplacer. Un garde mobile fils de veuve souhaite être remplacé.

Que nous sommes loin des champs de bataille.


En fait, pas si loin.

Le journal de Loir-et-Cher donne des nouvelles des combattants.

Maxime Villers, sous-lieutenant au 3e chasseur, presque entièrement détruit à Wissembourg, a été blessé à la tête et fait prisonnier.

Il est aux ambulances prussiennes.

En réalité, il a été blessé à Spikeren. Né à Blois, en 1847, il finira sa carrière militaire comme général de brigade, adjoint au vice-amiral, commandant en chef, préfet maritime, gouverneur de Cherbourg. Pendant la guerre de 1870, il sera blessé deux fois, mais pas fait prisonnier, contrairement à ce qui est indiqué dans l’article de presse.

Adrien Vespa, sous-lieutenant au 73e, a été blessé à Borny en chargeant un corps de lanciers prussiens.

Il a reçu deux balles : une dans la cuisse, l’autre au côté, sortie près de l’épine dorsale. Il est soigné dans une maison particulière, à Briey.

En réalité, il a été blessé à RezonvilleQuoique son dossier à la légion d’honneur indique qu’il a été blessé à Gravelotte. Né à Blois en 1844, il finira sa carrière militaire comme capitaine adjudant major au 2e régiment étranger, au Tonkin. Chef de bataillon retraité, il décèdera le 26 novembre 1925, aux Invalides, où il est pensionné.

Le colonel Auguste Billet, du 4e cuirassiers, dont la mort avait été annoncée, a réchappé à l’horrible boucherie de Reichoffen, mais a été fait prisonnier. Son fils, le sous-lieutenant Billet a été blessé.

Auguste-Billet

Sa mort avait été annoncée avec celle du capitaine d’Eggs, Pelletier, du lieutenant Schiffmacher et Boulaud, du même régiment. D’Eggs et Schiffmacher sont mort à Froeschwiller, le sous-lieutenant Billet y a été blessé.

Je n’ai pas trouvé trace des officiers Pelletier et Boulaud dans la liste des officiers tués à Reichoffen. Auguste Billet, reviendra de captivité le 26 mars 1871, pour prendre le commandement du régiment à Limoges. Il est tué le 4 avril de la même année, lors des émeutes de la ville.

Le 4e cuirassiers a perdu, ce jour-là, un tiers de son effectif, en protégeant la retraite de l’armée française.

Il y aussi les dénonciations : plusieurs habitants de Saint-Claude s’émeuvent que Henri Courtin, marié le 17 août, a été exempté de la garde mobile alors que ses parents et son grand-père sont vivants et valides. Je suppose que leurs fils n’ont pas eu la même chance.

Et l’on parle ici de la société internationale de secours aux blessés des armées de terre et de mer. Une souscription est faite, avec la liste des généreux donateurs. On y apprend que le maire et le curé de Villerbon ont donné chacun 10 francs, tandis que le maire de Saint-Denis-sur-Loire a donné 20 francs et un paquet de linge.

Depuis le 18 août, deux milles jeunes hommes sont arrivés à Blois. Ils doivent former la garde mobile. Les jeunes gens de 20 à 25 ans composant le personnel des séminaires sont incorporés dans l’armée. L’évêché de Blois met à la disposition des ambulances, ceux de ses membres valides.

La garde nationale de Blois a commencé son service actif.

Non, la guerre n’est pas si loin.

Christine Lescène - Le Blog d'une Généalogiste - 21 août 2020