Second siège de Paris :
Les troupes régulières ne s’arrêtent pas et continuent leur avancée commencée la veille.
La brigade de Bocher, de la division Susbielle, tête de colonne d’attaque du corps de Cissey, se masse vers minuit à deux cents mètres de l’enceinte à la porte de Sèvre. Les sapeurs du génie installent des madriers, en silence, disposés en rampe et formant un étroit passage. Les hommes d’une compagnie du 18e bataillon de chasseurs pénètrent un par un, grâce à ce passage. Ce petit détachement s’élance sur le chemin de fer de ceinture et s’empare de la deuxième enceinte avant que l’alerte ne soit donnée.
Les divisions Bruat et Faron, du général Vinoy, entrent dans Paris à deux heures du matin. La seconde s’établit en réserve à Passy pendant que la première doit franchir la Seine et enlever la porte de Sèvres pour faciliter l’entrée du 2e corps. La brigade Bernard de Seigneurens traverse le pont-viaduc mais se trouve en difficulté dans le quartier de Grenelle. Elle réussit néanmoins à s’en emparer au moment où les troupes du général de Cissey, qui ont forcé la porte de Sèvres, la rejoignent.
Il est deux heures et demie du matin. La double enceinte sur la rive gauche est aux mains de l’armée régulière et les troupes de la brigade Bocher peuvent ouvrir la porte de Versailles. Les portes tombent les unes après les autres.
Les divisions Grenier et Laveaucoupet, du 1er corps, se dirigent sur le bois de Boulogne, entrent dans la place dès trois heures du matin, par les portes d’Auteuil et de Passy, la 3e division du général Montaudon gardant les positons de Neuilly et d’Asnières.
Les positions du Trocadéro et de la Muette, sur la rive droite, sont prises par la division Bruat. La tête de corps du général de Cissey occupe une partie du quartier de Grenelle, sur la rive gauche.
Les insurgés ont établi de nombreuses barricades, dont plusieurs sont équipées d’artillerie, à tous les carrefours principaux et près des portes. Ils résistent de toutes leurs forces, surtout à Montmartre, la place de la Concorde, les Tuileries, la place Vendôme et l’Hôtel-de-Ville.
Il est impossible de s’emparer de ces positions dans la journée. Les troupes régulières vont devoir les contourner le lendemain. En attendant, elles ont ordre de s’emparer de tous les points qui leur permettra d’atteindre ce but.
Dès six heures du matin, les troupes de la rive droite reprennent leur marche en avant. Les insurgés, revenus de leur surprise de la veille, tirent depuis les batteries des buttes Montmartre, de la place de la Concorde et des Tuileries. Ils balayent littéralement de leurs obus la place du Trocadéro et le quai de Billy.
La division Vergé se dirige vers le palais de l’industrie et le palais de l’Elysée dont elle s’empare. Les divisions Berthaut et l’Hérillier contournent le rondpoint de l’étoile et s’empare de ses défenses.
L’énorme barricade de la place d’Eylau est prise par le général Clinchant, qui s’empare, dans la foulée, de la porte Dauphine.
C’est un combat de rue qui se déroule dans Paris. Barricade après barricade, rue après rue, l’armée régulière avance.
Les divisions Berthaut et l’Hérillier s’engagent dans les rues Morny et Abbatucci, puis avancent sur la caserne de la Pépinière, l’église Saint-Augustin, dont elles s’emparent après de violents combats. Elles prennent une des grandes barricades, au débouché des rues d’Anjou et de Suresnes, en passant à travers les maisons et les jardins.
Le corps du général Clinchant prend la place Fontaine et le parc Monceaux, puis le collège Chaptal, la place de l’Europe et la gare Saint-Lazare, pour les troupes de droite. Les troupes de gauche prennent les places Saint-Ferdinand, de Courcelles, de Wagram, après de violents combats. A l’extrême gauche, elles s’emparent de la porte des Ternes, de la porte Bineau et de celle d’Asnières.
En appui, le général l’Admirault place ses troupes en arrière du chemin de fer de l’Ouest et à la porte d’Asnières.
Le général Moutaudon qui gardait la position de Neuilly et d’Asnières se porte en avant et s’empare du rond-point d’Inkermann, du village de le Vallois-Perret et des batteries extérieures, armées de 105 pièces de canon, et occupe la porte Maillot.
Sur la rive gauche, la 2e brigade de la division Bruat enlève plusieurs barricades dans le quartier de Grenelle et part appuyer le général Vergé qui doit s’emparer du palais de l’Industrie. Elle s’avance en longeant les quais et s’empare du ministère des affaires étrangères et du palais législatif.
Les trois divisions du 2e corps pénètrent dans l’enceinte par les portes de Sèvres et de Versailles.
La division Susbielle, en trois colonnes, débouche sur le champ de mars à sept heures du matin, sans avoir rencontré de résistance. L’école militaire est prise et un parc de 200 pièces de canon, d’énormes dépôts de poudre et des magasins de vivres et de munitions tombent aux mains de l’armée régulière.
La division Lacretelle prend les vastes bâtiments crénelés du collège des Jésuites, ainsi que les barricades imposantes qui y attiennent ainsi que les barricades qui protègent la mairie du 15e arrondissement et s’avance sur les rues Lecourbe et Croix-Nivert jusqu’à la place Breteuil où elle s’installe.
A la droite, la division Levassor-Sorval s’avance en trois colonnes vers le chemin de fer de l’Ouest. Le général Osmont longe les fortifications, enlève la porte de Vanves, une grande barricade armée d’artillerie à l’intersection du chemin de fer de ceinture et de la voie ferrée de l’Ouest. Le général Boulanger, à la tête du 114e de ligne, se dirige dans les rues Dombasle et Vouillé et s’installe sur la voie ferrée, au sud de la gare des marchandises.
La brigade Lian prend la rue de Vaugirard, s’avance sans obstacle jusqu’au boulevard Vaugirard et de là, se porte sur deux colonnes sur la gare Montparnasse, s’en empare et s’y installe.
Au 91e de ligne, Joseph Coulon est blessé d’un coup de feu à la fesse droite et Jean Baptiste Cressin, d’un coup de feu à l’abdomen. Le sergent Felix Jaillet est blessé à la hanche droite également par un coup de feu.
Dès les premières heures, un bataillon de chasseurs à pied, le 26e et l’artillerie, descendant du Trocadéro et suivant le quai du Cours-la-Reine, subissent une fusillade vive et continue venant de la place et du pont de la concorde, du quai de la rive gauche et du ministère des affaires étrangères ainsi que du quai et de la place des invalides.
Les chasseurs à pied, en tirailleurs sur le quai, devant l’ambulance et l’artillerie en position aussi sur le quai, à la hauteur de l’avenue d’Antin, font feu sur les insurgés. Dix-huit chasseurs sont tués ou blessés devant la porte de l’ambulance. Ils sont immédiatement relevés et portés par les brancardiers, à l’intérieur des baraques, malgré une grêle de balles et d’obus. Les projectiles hachent menus les arbres et recouvrent le sol de branchages. Dans l’enceinte de l’ambulance, le spectacle est le même. L’amiral Pothuau et plusieurs officiers généraux qui y pénètrent en sont témoins. Bientôt, toutes les baraques et les grandes tentes sont transpercées par les balles et projectiles des insurgés. Il faut évacuer dans l’urgence, les 548 blessés (246 militaires ou gardes mobiles du premier étage, les 286 fédérés et les 12 chasseurs à pied qui viennent juste d’être admis) sont transportés en hâte à l’intérieur du palais de l’industrie, dans les stalles écuries, protégées par les fermes en fer qui soutiennent l’étage. Huit voitures ambulances sont traînées, à la force des bras, en avant des deux baraques établies en longueur, depuis le Cours-la-Reine jusqu’au palais de l’Industrie. Placées les unes à la suite des autres et serrées autant que possible, elles forment un long pare-balles complété à l’aide de matelas, de tables, de banquettes pour protéger les barraques et les intervalles qui les séparent. Mais les obus continuent de tomber.
Les infirmiers de service et les femmes surveillantes réussissent à évacuer tous les blessés, sous le feu des balles et des obus.
Les baraques évacuées par les blessés, l’amiral Pothuau et les officiers généraux s’y installent pour diriger leurs troupes. Ces dernières n’avancent plus que lentement.
Le palais de l’Industrie n’est pas épargné par les tirs d’obus. La toiture vitrée explose et les obus tombent dans les jardins. Cinq infirmiers sont blessés par des éclats d’obus en relevant les blessés. Trois sont atteint dans l’avenue des Champs-Elysées dont deux qui devront être amputé de la jambe. Deux autres sont atteints en ramenant les blessés du quai du Cours-la-Reine.
L’ambulance volante du marquis de Hertfort est au Trocadéro puis au Palais de l’Industrie, où les soignant opèrent et pansent sans l’aide des chirurgiens de l’ambulance qui n’ont pas pu les rejoindre. Seul le docteur Chenu est là, resté à son poste malgré une grêle d’obus et de balles. L’ambulance retourne ensuite au Trocadéro.
A la fin de la journée, sur la rive gauche, la ligne des postes avancés s’appuie sur la Seine, au corps législatif, passe par les Invalides, la place de Breteuil, forme saillant à la gare de l’Ouest et vient en suivant la voie ferrée, s’appuyer aux fortifications à la porte de Vanves.
A Ulm, en captivité, Henri Mandin, de Boule, Vendée, soldat au 77e de ligne, décède de phtisie.
En Algérie, le pharmacien Signorio, du service de santé des armées est blessé lors de la razzia de Tifilcout. L’officier comptable Bordy est blessé au même lieu.
Christine Lescène - Le Blog d'une Généalogiste - 22 mai 2021