A Paris, les chevaux et les mulets sont réquisitionnés. Les parisiens se sont habitués au son du canon. La question alimentaire les préoccupe plus.
Armée de la Loire :
Le 15 au matin, le général Jaurès lance une brigade sur le village de Fréteval. Le lieutenant-colonel Michaud s’élance à la tête de deux bataillons sur les maisons et la tour de Fréteval, aux mains des prussiens qui les accueillent avec une terrible fusillade. Le colonel du Temple appuie l’attaque et protège les sapeurs du génie chargés de détruire sous le feu de l’ennemi, le pont de bois de Fréteval. Pendant ce temps, l’amiral Jauréguibbery se prépare à défendre Vendôme, par la route Blois.
Les éclaireurs de Villeromain annoncent à l’amiral que l’ennemi arrive de Blois, par la grande route. Il se déploie à l’abri de bois de la Barde et de ceux qui entourent le village de Sainte-Anne. Les tirailleurs français, soutenus par le feu des mitrailleuses, les arrêtent.
D’autres colonnes arrivent vers deux heures en avant des villages de Rocé et de Villetrun. C’est l’aile droite prussienne. Mais l’ennemi ne réussit pas à déloger l’amiral. Les batteries du faubourg du Temple ont plus de peine. Les mobiles de l’Isère se battent de toutes les forces, de toutes leurs munitions et tiennent leur position.
Contrairement à l’amiral Jauréguibbery qui réussit à maintenir ses positions, le 17e corps est moins heureux. Le commandant Prudhomme est grièvement blessé et ses soldats doivent abandonner Bel-Essort. Les troupes repassent sur la rive droite, par le pont de Meslay qu’elles brûlent en se retirant.
Le général Barry, replié sur Saint-Amand reste sur place, prêt à se retirer sur Montoire, en cas d’attaque sérieuse.
Dans la nuit, Chanzy reconnait que l’armée n’est plus en état de repousser l’ennemi. Il faut battre en retraite sur Le Mans et abandonner Vendôme et sa région.
Il dirige ses trois corps par les routes du Mans, vers l’Huisne et la Sarthe.
Au 75e régiment de mobiles du Loir-et-Cher et du Maine-et-Loire, la colonne formée vers midi, traverse Vendôme. Très vite, ils arrivent sur les hauteurs de Courtiras, sur la rive droite du Loir. Vers trois heures, ils redescendent dans la vallée et se portent en appui des troupes engagées en traversant le village de Naveil. Le sous-lieutenant Ch AL Dubois est grièvement blessé. Il décèdera le 3 janvier.
A Cloyes, l’ambulance volante de Pont-l’Evêque, dirigée par Léon Féret, s’installe au château de Montigny, que la duchesse de Mirepoix à mis à sa disposition. Elle a suivi la retraite de la 2ème armée de la Loire jusqu’à Fréteval. Elle a cherché des blessés sur les champs de bataille. Au château, elle soigne les varioleux, vaccine, ampute, désarticule, etc..
Au 33e régiment, mobiles de la Sarthe, en avant du Mans, le temps s’écoule tranquillement ou presque. Les hommes reprennent des forces, passent l’après-midi en ville, dans leurs familles. L’encombrement de la cité est inouï. Tous les établissements militaires regorgent de malades et de blessés. Il y a un grand nombre d’ambulances privées, les écoles, le théâtre sont occupés, même les églises sont mises à disposition des détachements de toutes sortes qui arrivent en ville, rescapés de la retraite de la deuxième armée de la Loire. La cathédrale est transformée en caserne. La nef et le pourtour du chœur sont dégarnis des chaises, recouverts de paille pour y loger les soldats. Les soldats sont épuisés par la retraite, les combats, la marche forcée dans cet hiver si rigoureux, affamés par une intendance qui ne suit pas. Les habitants remplissent de larges récipients de soupe qu’ils viennent distribuer à ces hommes épuisés. Des femmes et des jeunes filles entrent dans la cathédrale, chargées de brocs remplis d’eau chaude. Elles déchaussent les mobiles, lavent leurs pieds meurtris, les pansent avec de la charpie, des onguents, des linges, réconfortant ces hommes de quelques mots. Combien d’entre elles a un fils, un frère, au loin, prisonnier, blessé, ou attendant le combat suivant ou mort ?
A Janville, nos cinq officiers mobiles du 75e doivent changer de résidence. Leurs logeurs souhaitent récupérer l’intégralité de leur demeure et les blessés sont déménagés dans l’ambulance établie, de l’autre côté de la rue. Un habitant de Janville, Bastien, qui a déjà eu l’occasion de leur rendre service, les emporte, un à un, comme des poupons, dans leur nouveau logis. Il faut dire que Bastien est une force de la nature. Raoul, Gaston et Charnod occupent la même chambre. Le colonel et de Maricourt sont dans une autre pièce. Ils y font la connaissance de deux blessés, un sous-lieutenant d’infanterie et un zouave pontifical. Le sous-lieutenant d’infanterie, Pratz, est un vieux sous-officier, sergent de magasin, envoyé comme sous-lieutenant dans un régiment de marche au moment de la déclaration de guerre. C’est un vieux soldat timide qui n’ose pas leur parler, pendant les premiers jours. Sa blessure est singulière. Une balle a troué la plaque de son ceinturon, l’a traversé de part en part et est ressortie en rasant l’épine dorsale. Il sera le premier guéri de tous. Le zouave pontifical, M.Oudet, de Nantes, souffre beaucoup de son poignet brisé par une balle. Tous les quarts d’heure, il interpelle le colonel, lui-même souffrant beaucoup mais proche de la sonnette, pour qu’il appelle la vieille dame qui veille sur deux. Le pauvre homme est totalement myope, à la grande surprise des autres militaires. Mais comment pouvait-il tirer ? Il ne tirait pas. Pourquoi s’est-il engagé alors ? Par devoir !! Au grand soulagement de ses compagnons de chambrée, des amis viendront le chercher pour l’emmener à Orléans. Il y sera amputé du bras et en mourra le lendemain.
A Belfort, les forts des Barres, de Bellevue, le château, la position de Danjoutin reçoivent au moins 5 000 projectiles. Quelques bombes arrivent aux Barres. En réponse, les français ont tiré près de 4 000 coups de canon. Un soldat du 45e est décapité par un obus, devant la maison de Lebleu, l’avocat. Onze soldats du même régiment sont blessés ou tués pendant leur sommeil.
Christine Lescène - Le Blog d'une Généalogiste - 15 décembre 2020