• Description

A Paris, l’ennemi tente une reconnaissance vers onze heures et demie, dans la presqu’île de Gennevilliers. Une barque montée par plusieurs hommes cherche à passer la Seine du côté du Port-aux-anglais. Ils sont interceptés par la surveillance des postes avancés qui tire à bout portant.

Thionville, les premiers bombardements commencent dès le matin. Le commandant Marie Félicien de Bernardy de Sigoyer a la jambe brisée. Après la prise de Thionville par les prussiens, la jambe appareillée, il réussira à s’évader et rejoindre l’armée du Nord. Joseph Pierre Calarnou, trente-trois ans, nafit de Lesneven, Finistère, maréchal des logis au 7e artillerie, reçoit un éclat d’obus qui lui fracture l’articulation tibio-tarsienne. François Marie Gorin, vingt-trois ans, de Saint-Trimoël, Côtes-d’Armor, soldat au 18e régiment provisoire perd la vue après avoir reçu des éclats de pierre dans les yeux.

Dans l’Eure, tout le 3e bataillon de la garde mobile de l’Ardèche, renforcé de la moitié du 2e et d’une compagnie de francs-tireurs, arrive à Vernon vers trois heures du matin. Ils se dirigent sur les hauteurs de la forêt de Bizy, qui couvrent Vernon du côté de Pacy-sur-Eure, où l’ennemi est signalé depuis la veille.

Vernon

Le commandant de Montgolfier, avec trois compagnies du 3e bataillon, gardent la route principale de Vernon à Evreux et le commandant Bertrand, avec les quatre compagnies du 2e, renforcées des francs-tireurs de Seine-et-Oise, est en observation des hauteurs et des défilés du Petit-Val et de la grande route de Paris. Deux compagnies sont placées à un km de l’entrée et de la sortie de la ville.

Vers sept heures et demie du matin, les prussiens apparaissent sur la route de Pacy-sur-Eure. Ils passent, sans s’en rendre compte, au milieu des gardes mobiles.

Vers huit heures, leur avant-garde pénètre dans la ville pour y faire des réquisitions et essuie quelques coups de feu. Ils s’enfuient en emmenant des otages et tentent de passer par la route de Paris, où ils sont reçus par les mobiles de l’Ardèche et doivent passer à travers bois.

Un combat s’engage sur la grande route de la forêt où l’ennemi tente de forcer le passage. Pendant une heure, une vive fusillade les oppose aux trois compagnies du 3e bataillon de l’Ardèche, sous les ordres du commandant de Montgolfier. Deux sont tués et six blessés, dont deux grièvement. Louis Cuoq, garde mobile de l’Ardèche, a le fémur droit fracturé par un coup de feu. Jean Pierre Henri Jullien, garde mobile de l’Ardèche, est blessé à la cuisse gauche par un coup de feu.

Après la retraite de l’ennemi, le colonel Thomas reçoit l’ordre d’occuper Vernon.

En Eure-et-Loir, les francs-tireurs des Alpes-Maritimes, sous les ordres du général Fiereck, coupent les voies ferrées en avant de Bonneval, dans la direction de Chartres.

A Nogent-le-Rotrou, les troupes du lieutenant-colonel des Moutis arrivent à cinq heures et demie du matin. Après avoir pris un peu de pain à la mairie, elles repartent sur Bellême, à vingt-quatre km de là. Une demi-heure plus tard, les prussiens entrent dans la ville.

L’ennemi ne pourra pas les poursuivre. Le général Jaurès, accompagné d’un bataillon de zouaves pontificaux vient d’arriver par le chemin de fer et prend position en dehors de la ville. Un bref combat bloque les prussiens et permet aux hommes de Des Moutis de partir. Mais ils sont épuisés, affamés, et c’est avec beaucoup de peine qu’ils se dirigent sur Bellême. Mais ils ont sauvé leur artillerie et leurs bagages. Ceux du 2e bataillon de l’Orne étaient restés à Thiron. Grâce à l’officier payeur Sanson, au dévouement du caporal Ernult et du garde mobile Chollet, ils ont réussi à tout ramener, malgré les balles prussiennes.

La pluie tombe à torrent sur les hommes épuisés qui arrivent à Bellême, à une heure de l’après-midi. Mais ils ne peuvent installer leur campement. Les prussiens sont trop près. Le général Jaurès, qui vient de prendre le commandement de l’armée de l’ouest les envoie, à cinq heures du soir, sur Mamers, pour éviter les prussiens qui arrivent à marche forcée de Longny.

Belleme

A Santilly, un détachement de soldats et de francs-tireurs français de quatre-vingts hommes, venant de Lumeau et de Baigneaux, surprend un poste prussien de vingt-cinq hommes. Les prussiens sont tués à moins de cent mètres des habitations. En représailles, les prussiens arrivent le jour-même à plus de 4 000 pour occuper le village. Ils arrêtent le maire et l’emmène prisonnier vers la Prusse. Il réussira à s’évader, le 8 décembre.

A Belfort, les allemands établissent des pièces de gros calibre près de Roppe, en face du chemin qui conduit à Menoncourt et à Valdoie, en arrière de l’usine Page. Les canons des Barres, du Château et de la Miotte tentent au maximum de gêner leur installation.

En Côte-d'Or, à Chambœuf, les grenadiers badois surprennent les garibaldiens au saut du lit. La veille, les rôles étaient inversés et ils viennent se venger.

Chamboeuf

Les trois quarts des hommes s’enfuient vers les villages voisins. Les allemands occupent le terrain qui domine le village et envoient des pétroleurs mettre le feu à plusieurs maisons, dont celle de Mutin, ancien soldat de la Crimée, blessé à Sébastopol, qui, la veille, avait guidé les francs-tireurs, vers un combat perdu par les grenadiers. La lutte s’engage à la lueur des incendies. Mais les allemands n’ont ni artillerie, ni cavalerie, et soixante-et- un des hommes qui avaient fui, reviennent combattre pour protéger le hameau. Ils s’embusquent dans les maisons et tirent sur les allemands, jusqu’à ce qu’ils se retrouvent à manquer de munitions. Ils s’apprêtent à battre en retraite lorsqu’une fusillade éclate depuis leur voie d’échappatoire. Craignant d’être cernés par les badois, ils se rendent compte que des renforts viennent d’arriver. Ce sont d’autres fuyards du matin qui reviennent se battre, dont une section de vingt-deux vauclusiens, conduite par un habitant. Les badois sont pris à revers, pour ajouter à leurs difficultés, la pluie tombe en rafales violentes et ils s’enfuient, n’emmenant que leurs blessés. Vers onze heures, tout est fini. Il ne reste plus qu’à éteindre les incendies. 83 francs-tireurs de Lyon et du Vaucluse, mal exercés et surpris au saut du lit ont arrêté 330 grenadiers. Les pertes françaises se limitent à six blessés.

A Bitche, il y a trop d’officiers qui ne servent pas à grand-chose. Ils veulent se battre, mais Bitche est un fort assiégé où ils ne peuvent guère être utiles, alors, le colonel Teyssier en autorise trois à quitter la place, à leurs risques et péril : Villebois du 99e, Baron du 48e et Gache du 49e. Ils veulent rejoindre l’armée du Nord.

Puis il reçoit l’ordre du gouvernement, d’envoyer les officiers qui ne sont pas utiles à la défense de Bitche, pour rejoindre une des armes de l’intérieur. Une bonne vingtaine est candidate à l’aventure, mais il faut qu’il puisse sortir. Il faut les déguiser et surtout, il faut le concours de la population.

Chacun franchit les lignes sous des vêtements d’ouvriers, crédibles vu les forges et verreries qui avoisinent Bitche, muni de lettres de recommandation de propriétaires d’ateliers, ou de maires. Et pour parfaire l’illusion, ils sont escortés par des femmes et leurs enfants, passant pour leurs familles. Quatre officiers partiront avec les papiers d’un aubergiste du nom de Bournique, accompagnés de sa femme et de son jeune fils, sans que les prussiens s’étonnent de tant de maris pour une seule femme. Une jeune fille, devenu depuis madame Lefresne, cantinière au 106e de ligne, fera passer les lignes à deux officiers, un supposé père et un supposé frère. Après le départ de ces officiers, la garnison de Bitche, toujours sous les ordres du lieutenant-colonel Teyssier, comprend 77 officiers ou assimilés, 2777 troupes, voituriers requis, etc ; 34 cantinières, 310 chevaux, et aux hôpitaux 2 officiers et 106 hommes de troupe.

Et la vie va continuer, sans grand évènement, jusqu’au 31 janvier.

Christine Lescène - Le Blog d'une Généalogiste - 22 novembre 2020